Compte rendu du Webinar sur « Les défis du financement de l’action climatique locale : quelles perspectives pour les villes signataires de la CoM SSA ? » Journée CoM SSA au Sommet Climate Chance Afrique 2021
15 septembre 2021 de 9H à 10H30 UTC
CONTEXTE
La pandémie de la COVID 19 a mis en évidence la nécessité de réinterroger la place des collectivités locales dans le dispositif décisionnel de l’état et l’urgence de procéder à un véritable changement de paradigme en vue de rendre les communautés et les territoires plus résilients aux chocs futurs. En effet les collectivités locales, qui de par leur force, leur ancrage et leur proximité avec la population sont appelées à jouer un rôle essentiel dans la mise en œuvre des plans de relance économique qui doivent être alignés sur les Contributions Déterminées au niveau National (CDN), comme le recommandent divers organismes.
Dans cette perspective, les efforts entrepris dans ce sens dans le cadre de la Convention des Maires pour l’Afrique Subsahariennes (CoM SSA), initiative lancée par l’Union européenne en novembre 2015 pour appuyer et soutenir les efforts déployés par les autorités locales dans la mise en œuvre de politiques énergétiques durables et climatiques, a permis d’accompagner les villes signataires de la Convention dans l’élaboration de leur Plan Climat et d’identifier un ensemble de projets nécessitant un financement pour leur mise en œuvre
L’année 2021 est une année de vérité pour le climat, dans la mesure qu’elle a été jalonnée par plusieurs actions mettant en avant le partenariat de Marrakech pour l’action à travers notamment la mobilisation de la finance climat et la prise en compte des efforts des collectivités territoriales pour contribuer à augmenter l’ambition et renforcer la résilience.
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CGLU Afrique en partenariat avec le Conseil des Commune d’Europe ‘CCRE a organisé, le 15 septembre 2021, en marge du Sommet Climate Chance dans le cadre de la journée de la Convention des Maires pour l’Afrique Sub-saharienne (CoM SSA), une session sous le thème « Les défis du financement de l’action climatique locale : quelles perspectives pour les villes signataires de la CoM SSA ? ».
Le webinaire, modéré par M. Jean Pierre Elong Mbassi, Secrétaire Général de CGLU Afrique, a vu la participation de représentants d’institutions régionales et locales, d’organismes financiers et de maires de communes (voir programme).
Dans son intervention d’ouverture Mme Soham El Wardini, maire de Dakar, a souligné que l’urgence aujourd’hui est de rendre les territoires plus résilients aux chocs futurs. La crise de la COVID 19 a mis en exergue la nécessité de réinterroger la place des collectivités locales dans les dispositifs décisionnels des Etats. En effet, elles sont par leur force, leur ancrage, et leur proximité, appelées à jouer un rôle essentiel. Aujourd’hui le monde fait face à de grands espoirs, notamment de mettre fin à la pandémie de covid-19. Selon, Madame le maire, Il faut nécessairement améliorer les mécanismes d’accès au financement de la lutte contre le changement climatique. Sans moyens de financement appropriés les collectivités locales ne peuvent pas développer des projets et des programmes d’envergure et participer efficacement aux CDN. Pour rendre plus efficace les contributions des collectivités territoriales, il faut enlever les défis liés à l’accès au financement climatique. Les Communes Territoriales ne sont pas si autonomes pour accéder au financement, assez souvent, elles doivent passer par l’Etat et cela leur complique les tâches. Certes, les financements existent mais l’accès pour les Collectivités territoriales à ces financements reste délicat.
Les villes selon Mme le maire doivent connaitre les sources de financement, les modalités d’accès, les critères d’éligibilité, l’accompagnement de l’Etat pour la préparation d’un bon dossier du financement, la compréhension des mesures de financement, les types de projet éligible, les structures d’ancrage mais aussi la meilleure façon de remplir les formulaires. C’est pourquoi, il faut renforcer la capacité des acteurs internes et externes des villes sur les opportunités offertes par la finance climat. Dans le cadre de la COM SSA la ville de Dakar a élaboré, grâce au financement de l’UE, un plan climat énergie territorial. Ce plan climat a permis à la ville de Dakar de dégager des pistes d’action dans le domaine de l’atténuation de GES, de l’adaptation et de la réduction de la vulnérabilité des territoires au changement climatique.
Mme Irène Mingasson, Ambassadrice de l’UE au Sénégal, a souligné que l’UE a mis les défis climatiques au cœur du partenariat à travers le pacte vert pour l’Europe en faveur du climat, de la biodiversité, et de l’environnement, et il est largement constaté que c’est au niveau local que se réalise l’engagement des gens. C’est pourquoi l’Union européenne soutient, depuis 5 ans, la Convention des Maires pour l’Afrique Subsaharienne (CoM SSA), initiative mise en place pour soutenir les territoires dans la mise en place leurs plans climat territoriaux afin de les encourager à réduire leurs émissions de Gaz à effet de serre.
L’Union européenne œuvre au niveau du Sénégal pour connecter et relier tous les niveaux d’action et tous les leviers disponibles pour aller loin dans la lutte contre le changement climatique. L’Union européenne vise à cesser les émissions de GES d’ici 2050, dissocier la croissance économique de l’utilisation des ressources. D’ici 2027, la commission européenne consacrera au moins 25% du budget de son budget pour le climat et l’environnement. Cette approche guide également la stratégie de l’Union européenne post-covid pour qu’elle soit résiliente, durable et équitable. Avec la Banque Européenne d’Investissement (BEI), 27 Etats de l’UE prennent aussi des engagements forts pour la réduction des émissions de GES et la préservation de l’environnement. Depuis 2015, l’UE mène des projets à Dakar et à Pikine qui ont produit des plans climat et énergie territoriaux et toute une série de projets pilotes, dont le fil conducteur reste l’information et la sensibilisation. A Dakar, plus de 50 groupes de discussions rassemblant plus de 500 acteurs communautaires de 19 communes de la ville, c’est à dire 1 million de dakarois, ont été sensibilisés aux enjeux de climat. Dans la ville de Pikine, plus de 20 comités locaux ont été mis en place dans chacune des vingtaines communes de l’agglomération mobilisant ainsi plus de 1000 acteurs communautaires qui sont passés à l’action locale. Ces projets ont permis de préparer de futurs investissements à grande échelle très convainquant pour les bailleurs. Deux projets ont vu le jour dans ce sens, l’un est financé par la coopération espagnole et l’autre financé par l’Union européenne. D’autres investissements sont également envisagés sur la base des plans élaborés dans le cadre de la COM SSA en particulier pour la mise en œuvre des CDN au niveau local. « L’Union européenne continuera à apporter son soutien aux collectivités territoriale » a conclu Mme l’Ambassadrice de l’Union européenne au Sénégal.
Selon M. Frédéric Vallier, Secrétaire Général de CCRE, tout le monde reconnait aujourd’hui que l’engagement des villes et des territoires est une condition capitale pour lutter contre le changement climatique. Toutefois, la capacité donnée aux villes d’investir pour le climat, de trouver des financements, d’avoir l’accès à la finance climat reste insuffisant. Il a souligné l’engagement de l’UE d’accompagner les villes dans leur lutte contre le changement climatique depuis de nombreuses années. Pour M. Vallier, les projets pilotes réussis doivent être généralisés mais il a appelé pour l’invention d’un nouveau modèle de développement mené par l’ensemble des acteurs, qui soit à la fois garant d’une prospérité pour les citoyens, et plus sobre que le modèle utilisé par le passé, que ce soit en Europe, en Amérique, en Asie. M. Vallier ajouté que « si on arrive à mobiliser autant de fonds mobilisés pour lutter contre la covid 19 et ses conséquences économiques dans l’action climatique, on pourra faire un grand pas dans la lutte contre le changement climatique. Que la vie sur la planète ne pourrait être préservée que si nous agissons tous maintenant ».
Mme Yaou Méry, représentant le Ministère de l’Environnement du Togo a mis l’accent sur le problème qui confronte les collectivités territoriales à l’inaccessibilité de ces dernières au financement. Elle a parlé ensuite du programme Readiness régional qui porte sur la mise en œuvre de l’action climatique. L’objectif primordial du Readiness, qui porte sur le renforcement des capacités institutionnelles des Collectivités Territoriales de l’espace de l’UEMOA, est d’aider les Etat membres de l’UEMOA à mobiliser les ressources du Fonds Vert Climat (FVC) pour financer les mesures d’adaptation et d’atténuation des Collectivités Territoriales et contribuer également à la territorialisation des CDN. Cet objectif est décliné en 3 objectifs spécifiques :
– Renforcer des capacités des institutions au niveau local dans la zone UEMOA pour permettre de mieux appréhender la problématique du changement climatique à travers une assistance technique et des ateliers de formation,
– Favoriser l’accès à la finance climat au niveau local,
– Renforcer la coopération locale pour la lutte contre le Changement Climatique.
Selon, M. Cheikh Ahmed Tidiane Ba, Directeur Général de CDC Sénégal a informé que son institution a, à travers le dispositif législatif, investi dans des actions d’intérêt général comme le financement du développement territorial, le financement de paiement, de logement et des projets stratégiques définis par l’Etat, c’est un accompagnateur des politiques publiques, la CDC finance ainsi des projets de politiques publiques, notamment pour les collectivités territoriales. La CDC au Sénégal, est en train de finaliser une stratégie pour accompagner les Collectivités Territoriales dans l’expertise et le financement.
Selon, M. Seyni Nafo, « La finance climat est le moteur, elle est importante à tous les niveaux, national et local. D’ici à 2030 nous avons besoin de 3 000 milliards de dollars pour que toutes les actions soient menées à tous les niveaux en Afrique » qu’il a fallu beaucoup de temps pour que le niveau international tienne en compte que la mise en œuvre des projets réussis ne peut se faire qu’au niveau local et territorial. Les défis à relever pour l’octroi des financements sont : l’alignement et l’intégration des plans Climat Territoriaux dans les CDN ; la mutualisation des plans climat des Collectivités Territoriales pour atteindre un volume critique et l’identification des institutions financières capables de porter ces plans.
Mme Kobie Brand, a rappelé que le financement des actions climatiques au niveau local ne sont pas suffisants, qu’il faut beaucoup plus de soutiens et un programme commun pour réussir la résilience et aligner les cibles de la lutte contre le changement climatique. Les aléas du changement climatique sont ressentis au niveau des villes, et ils doivent être traités au niveau de ces villes. Mme Brand a ajouté qu’il faut capitaliser sur les bonnes pratiques. Elle a informé du soutien que ICLEI Afrique apporte aux gouvernements locaux pour lutter contre le Changement Climatique. « 260 communes bénéficient de l’appui pour la conceptualisation des projets et les études de faisabilité avant de passer aux étapes suivantes ».
Pour conclure, M. Jean-Pierre Elong Mbassi, Secrétaire Général de CGLU-Afrique « appelle à ce que la voix des collectivités locales résonne jusqu’à Glasgow à l’occasion de la COP26 et que la coopération décentralisée soit mieux financée, notamment grâce à une meilleure mutualisation des efforts entre les collectivités locales ».