Les échanges, l’apprentissage par les pairs et la solidarité entre municipalités et régions du monde entier sont essentiels dans la lutte contre le COVID-19

 

 

Les villes et les régions du monde entier sont en première ligne dans la lutte contre la crise du COVID-19. Le partage d’expériences entre elles est essentiel et, à ce titre, l’UE devrait les inclure dans sa réponse globale à la pandémie. Tel est le message partagé par plus de 70 participants d’Europe et d’Afrique qui se sont joints au webinaire “COVID-19″ : EU global response & local government international action” organisé le vendredi 17 avril par PLATFORMA.

Ce webinaire a réuni des représentants des institutions internationales et européennes (Nations unies, Commission européenne, Parlement, diplomates des représentations des États membres auprès de l’UE), des élus locaux et régionaux et des représentants des associations nationales de villes et de régions.

Aida Liha Matejicek, de la Coopération internationale et développement de la Commission européenne, a donné un aperçu de la réponse globale de l’UE au COVID-19 adoptée la semaine dernière. Elle a insisté sur l’esprit de coordination “#TeamEurope” entre les donateurs financiers.

La fonctionnaire de l’UE a clairement indiqué que les personnes les plus vulnérables et les systèmes de santé fragiles étaient au centre de la réponse de l’UE, qui est “aussi complète que possible”, avec le principe de “ne laisser personne en marge”. Cette réponse vise à “garantir le respect des droits de l’homme et de la démocratie, en mettant l’accent sur les plus vulnérables, notamment les femmes et les jeunes filles, et sur la violence domestique dont elles peuvent être victimes“.

Mme. Matejicek a reconnu que les gouvernements locaux et régionaux ont été les premiers à être confrontés à la crise. “L’apprentissage entre pairs dans ce sens est extrêmement précieux et important“, a-t-elle déclaré. “Une réponse communautaire et une approche collective sont les plus importantes pour répondre aux besoins de ceux qui sont le plus durement touchés“.

“Se réinventer”

Le maire de Strasbourg et président de Cités Unies France, Roland Ries, a été le premier à partager son expérience d’un point de vue municipal. “Le COVID-19 et la catastrophe qu’il a provoquée, changent tout et nous montrent à quel point le système international est fragile, à quel point nos institutions sont fragiles et à quel point l’humanité est fragile“, a-t-il déclaré.

Il s’est félicité de l’esprit “Team Europe” adopté par les institutions européennes et a souligné la nécessité d’une solidarité à l’intérieur et à l’extérieur de l’Europe. “C’est un moment où nous avons aussi l’occasion de nous réinventer, de mieux nous aligner sur les 17 ODD adoptés par les Nations unies en 2015, de capitaliser et de renforcer nos amitiés et nos partenariats à travers le monde“, a-t-il déclaré.

Cités Unies France travaillera en étroite collaboration avec les collectivités locales et régionales et leurs associations représentatives en Afrique (au Sahel en particulier) et en Haïti.

Un cadre de coopération mondiale

Mme Pilar Díaz, maire d’Esplugues de Llobregat en Espagne, a souligné la longue expérience de la province de Barcelone en matière de coopération au développement de ville à ville et de région à région. “C’est un moment crucial pour mettre en évidence la valeur ajoutée de la coopération décentralisée“, a-t-elle déclaré. “Nous devons penser à un cadre de coopération global, car le virus ne sera pas contenu s’il n’est pas contenu de la même manière dans toutes les régions du monde“.

Mme Díaz s’est également inquiétée de l’augmentation des inégalités sociales et économiques. Elle a salué les mesures d’urgence de plus de 900 milliards d’euros en faveur de l’Amérique latine mais a souligné : “nous ne savons toujours pas quelle sera l’importance de la coopération au développement, et en particulier des allocations aux collectivités locales et régionales, dans le prochain budget à long terme de l’UE“.

Hans Janssen, le maire d’Oisterwijk aux Pays-Bas et représentant de VNG International, a souligné que les gouvernements locaux et leurs associations représentatives ont l’habitude d’agir dans des situations de crise. “Nous devrions utiliser l’expérience déjà acquise pour nous entraider, et nous appuyer sur les outils déjà développés : planification de scénarios, évaluations des risques, plans de relance” a-t-il déclaré. VNG, travaille au Liban, en Irak et en Ouganda pour faire face aux conséquences des crises de réfugiés et a également été active en Haïti, après que lepays ait été frappé par un terrible tremblement de terre. Il a appelé l’UE à apporter un soutien concret, à être “plus flexible dans les programmes existants afin de permettre aux gouvernements locaux et régionaux de mieux s’adapter à la situation” et à “devenir plus pragmatique et plus réactif“.

Janssen a également souligné le rôle essentiel des associations nationales de collectivités locales et régionales dans les pays partenaires, qui constituent “un point de liaison essentiel pour les municipalités qui souhaitent entrer en contact avec le gouvernement national”.

Les gardiens de la solidarité internationale

Jean Pierre Elong Mbassi, secrétaire général de Cités et Gouvernements Locaux Unis (CGLU Afrique), a déclaré que jusqu’à présent, l’Afrique était “parmi les régions qui ont été le moins touchées par le COVID-19, contrairement à ce que la communauté internationale et l’Organisation mondiale de la santé attendaient“.

Il a également précisé que seules les villes et les régions étaient en mesure de prendre des mesures pour réagir à la propagation du COVID-19 en Afrique : “Les gouvernements locaux sont les gardiens de la solidarité internationale. ils sont le meilleur endroit pour défendre le multilatéralisme et la coopération internationale, même lorsque les gouvernements nationaux sont à la traîne“.

Mbassi a souligné que le confinement est “une catastrophe pour le secteur informel“, en particulier en Afrique subsaharienne où les gouvernements nationaux ne peuvent apporter qu’un soutien très limité. Seule la solidarité des populations et des gouvernements locaux permet de résoudre le problème.

Il s’est également dit profondément préoccupé par les conséquences financières directes de la crise sur les citoyens. Il a demandé à l’UE de canaliser les fonds vers les municipalités et les régions dès que possible. “La coopération décentralisée est essentielle pour aider à partager les expériences et les pratiques afin de résoudre non seulement la crise immédiate mais aussi les conséquences de l’épidémie, ce qui nécessitera de nombreux efforts tant au niveau social, institutionnel qu’économique“, a ajouté M. Mbassi.

“Les gouvernements locaux sont très réactifs”

Kelmend Zajazi, directeur exécutif de NALAS, a souligné que l’échange d’expériences entre les gouvernements locaux et régionaux est essentiel. Il s’entretient chaque semaine avec des villes et des régions d’Europe du Sud-Est pour prévenir la propagation du COVID-19, mais aussi pour trouver des solutions aux besoins quotidiens des citoyens : offrir un accès aux services publics en ligne, à la culture ou à l’éducation par exemple.

Les gouvernements locaux sont très réactifs, beaucoup plus rapides que les gouvernements nationaux. Par exemple, beaucoup de villes ont déjà décidé de réduire les financements inutiles pour débloquer des fonds pour des questions plus urgentes“, a déclaré M. Zajazi.

Il a également souligné l’énorme préoccupation économique en Europe du sud-est sur “le prix à payer pour la période de reprise” alors qu’il pourrait y avoir des conséquences dramatiques sur les citoyens et les processus de décentralisation.

Le secrétaire général du CCRE, Frédéric Vallier, a souligné que “cette crise ne doit pas anéantir les progrès déjà réalisés sur l’état de la décentralisation dans les pays partenaires et en Europe“. Il a conclu : “Nous devons renforcer nos liens et nos capacités ensemble à travers le monde et renforcer ensemble le rôle des élus locaux et régionaux“.

La coopération décentralisée d’abord

La députée européenne Mónica Silvana González, membre de la commission du développement du Parlement européen (DEVE), a conclu le webinaire en déclarant qu’elle veillerait à ce que les collectivités locales et régionales jouent un rôle central dans le prochain budget à long terme de l’UE (CFP) et dans le nouvel instrument financier pour le développement (NDICI). Elle a expliqué que l’épidémie du COVID-19 pouvait être considérée comme “une opportunité” d’inclure dans la négociation du CFP des éléments qui n’auraient pas été possibles auparavant.

Elle a annoncé que, lors de la prochaine réunion de la commission DEVE, le mardi 21 avril, elle demandera directement à la commissaire européenne chargée des partenariats internationaux, Jutta Urpilainen, comment elle entend maintenir un rôle central pour les collectivités locales et la coopération décentralisée dans l’initiative “Team Europe”. Elle a enfin souligné que l’Amérique latine ne devait pas être oubliée dans la réponse de l’UE, y compris les pays qui ne sont plus éligibles à l’aide publique au développement (APD).